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Guide – Capital social

Guide juridique : le capital social de la société.

Par Franck BEAUDOIN, avocat

Publié sur droit.co et actualisé le 8 août 2022

Consultations d’avocat répondant aux questions fréquentes concernant le capital social.


SOMMAIRE

Qu’est-ce que le capital social d’une société ?

Le capital social représente l’investissement initial des associés.

Il peut être constitué par des apports en numéraire (c’est-à-dire de l’argent) ou des apports en nature (par exemple une marque, un site Internet). Les apports en industrie ne concourent pas à la formation du capital social.

En pratique, à la constitution de la société, les associés demandent à un dépositaire habilité (généralement une banque) l’ouverture d’un compte bloqué au nom de la société en formation. Les associés versent leurs apports en numéraire sur ce compte.

Dès l’immatriculation de la société, sur présentation d’un extrait k-bis en attestant, le dépositaire doit virer les fonds constituant le capital social sur le compte bancaire de la société. La société en dispose alors librement.

Le capital social est défini juridiquement comme le gage des créanciers, mais ce n’est pas un dépôt : le capital social est utilisé par la société.

Comment fixer le montant du capital social ?

Le capital social doit être fixé en fonction des besoins de la société.

À court terme, après la création de la société, le capital doit permettre à la société de financer ses investissements et ses charges jusqu’à ce que les revenus générés par l’activité de la société, ou le cas échéant les autres financements, prennent le relais.

À moyen terme, il faut également tenir compte des résultats prévisionnels. Il faut éviter que les capitaux propres de la société deviennent inférieurs à la moitié du capital social. Ainsi, si le plan d’affaires prévoit des pertes à l’issue du premier exercice social, le capital social doit être fixé à un montant permettant de maintenir des capitaux propres supérieurs à la moitié du capital social.

Par exemple, si le premier exercice social se solde par une perte de 5.000 €, il faut que le capital social se monte au moins à 10.000 € ; en effet, les capitaux propres seront alors de 5.000 € et ils ne seront donc pas inférieurs à la moitié du capital social.

À l’inverse, si une société ayant un capital social de 10.000 € réalise une perte de 6.000 € à l’issue du premier exercice, les capitaux propres deviennent inférieurs à la moitié du capital social (10.000 € – 6.000 € = 4.000 €).

Pourquoi faut-il éviter que les capitaux propres deviennent inférieurs à la moitié du capital social ?

La société dont les capitaux propres deviennent inférieurs à la moitié du capital social doit le déclarer au registre du commerce et des sociétés. L’information figure sur son extrait k-bis. La société doit ensuite reconstituer ses capitaux propres à un niveau au moins égal à la moitié du capital social et accomplir une nouvelle formalité auprès du registre. La « perte des capitaux propres » cause donc une mauvaise publicité et fait supporter les coûts de deux formalités.

Quels apports peuvent être faits à une société ?

On distingue trois catégories d’apports.

Les apports en numéraire correspondent à des sommes d’argent.

Les apports en nature portent sur des actifs corporels ou incorporels : fonds de commerce, droit au bail, clientèle, site Internet, nom de domaine, marque…

Les apports en industrie désignent les prestations qu’un associé s’engage à effectuer au profit de la société.

Les apports en numéraire et en industrie concourent à la formation du capital social ; ils sont rémunérés par des titres de capital présentant les mêmes caractéristiques. En revanche, les apports en industrie ne concourent pas à la formation du capital ; ils sont rémunérés par des titres inaliénables, sans valeur nominale.

Que signifie la libération du capital social ?

Lors de la création de la société, il est possible de ne verser (libérer) qu’une fraction des apports en numéraire composant le capital social. Cela ne concerne que les apports en numéraire. Les apports en nature doivent être intégralement libérés.

Pour une SAS, il faut libérer au moins la moitié du capital social lors de la création de la société. Pour une SARL, il faut libérer au moins le cinquième du capital social lors de la création de la société. C’est ce qu’on appelle la libération minimale du capital social.

Le solde doit être appelé avant toute augmentation de capital ou au plus tard dans un délai maximum de 5 ans à compter de l’immatriculation de la société.

Par exemple, pour un capital de 10.000 €, lors de la création de la société, il faut verser au moins 5.000 € pour une SAS et 2.000 € pour une SARL. Les associés ont l’obligation de verser le solde (soit, dans cet exemple, 5.000 € pour la SAS et 8.000 € pour la SARL) avant toute augmentation de capital ou au plus tard dans un délai de 5 ans.

Quel est l’intérêt de ne pas libérer immédiatement tout le capital ?

La libération d’une fraction du capital social offre un levier à l’associé. Sa participation est identique, quel que soit le montant libéré.

Par exemple, dans une SAS au capital de 10.000 € comportant deux associés, l’associé A peut détenir 60% du capital en versant 3.000 € (la moitié de son apport de 6.000 €) et l’associé B 40% en versant 2.000 € (la moitié de son apport de 4.000 €).

Le levier est plus important dans une SARL. Par exemple, dans une SARL au capital de 10.000 € comportant deux associés, l’associé A peut détenir 60% du capital en versant 1.200 € (le cinquième de son apport de 6.000 €) et l’associé B 40% en versant 800 € (le cinquième de son apport de 4.000 €).

Ce levier est temporaire, puisque l’associé est obligé de verser le solde de son apport lorsque le représentant légal de la société l’appelle et au plus tard avant une augmentation de capital ou dans un délai de 5 ans à compter de la souscription.

Qu’est-ce que la valeur nominale d’un titre (action ou part sociale) ?

La valeur nominale d’un titre correspond au montant qui résulte de la division du capital social par le nombre de titres émis.

Par exemple, pour une société dont le capital social de 10.000 € est divisé en 100.000 actions, la valeur nominale de chaque action est de 0,10 €.

Comment fixer la valeur nominale d’un titre ?

Il est souhaitable de fixer la valeur nominale à un multiple de 10, en retenant la valeur la plus faible possible : idéalement 0,10 €. Cela facilite les opérations ultérieures sur le capital social (augmentation ou réduction du capital) en évitant des rompus.

En quoi la valeur nominale d’un titre diffère-t-elle de sa valeur vénale ?

La valeur nominale d’un titre diffère de sa valeur vénale dès lors que la valeur de la société fluctue (positivement ou négativement). Il existe plusieurs méthodes d’évaluation de la valeur d’une société, mais au final la valeur n’est pas une notion mathématique totalement objective. Certains acquéreurs potentiels peuvent valoriser une société en fonction des synergies attendues ou d’autres paramètres (on parle alors de « goodwill »).

Qu’est-ce qu’une prime d’émission ?

En cas d’augmentation de capital, la différence entre la valeur vénale des titres et leur valeur nominale donne lieu à une prime d’émission.

Par exemple, si la valeur nominale d’une action est de 10 €, alors que sa valeur vénale est de 100 €, la prime d’émission est de 90 € (100 € – 10 €). L’action nouvelle est émise au prix de 100 €, mais sa valeur nominale n’est que de 10 € ; la prime d’émission de 90 € est comptabilisée parmi les capitaux propres de la société.

Qu’est-ce qu’un apport en nature ?

L’apport en nature fait à une société permet de valoriser des actifs corporels ou incorporels, en les incorporant au capital social de cette société. L’apporteur en nature reçoit des titres de capital en échange de son apport, de la même façon qu’un apporteur en numéraire.

Par exemple, les créateurs d’une entreprise peuvent déposer une marque et développer un site Internet avant de créer la société. Ils peuvent valoriser ces actifs en les apportant à la société. Cela suppose une évaluation. L’évaluation est arrêtée par les associés, en principe au vu du rapport d’un commissaire aux apports. Le recours à un commissaire aux apports est facultatif dans certains cas.

Quels sont les avantages des apports en nature ?

Les apports en nature permettent d’accroître le montant du capital social, sans mobiliser de liquidités.

Plus le capital social est élevé, plus la société peut investir, plus les capitaux propres sont consolidés. À cet égard, on rappelle qu’il faut éviter autant que possible que les capitaux propres deviennent inférieurs à la moitié du capital social.

Les apports en nature sont particulièrement utiles lorsqu’il est prévu d’ouvrir le capital social à des investisseurs : les apports en nature offrent alors un levier aux fondateurs, permettant de limiter leur dilution. Toutefois, ce levier pourrait également être obtenu à travers la prime d’émission des titres nouveaux.

Quels sont les inconvénients des apports en nature ?

Les inconvénients des apports en nature résident dans l’évaluation qu’ils supposent. En principe, le recours à un commissaire aux apports est obligatoire. Cela entraîne un coût et des délais.

Ne pas recourir à un commissaire aux apports, lorsque c’est possible, peut augmenter significativement les risques des associés.

Les apports en nature sont valorisés dans le capital social, mais ils ne peuvent pas être comptabilisés en charge et la TVA ne peut pas être récupérée.

Dans quels cas le recours à un commissaire aux apports est-il facultatif, pour des apports en nature ?

Le recours à un commissaire aux apports est facultatif lorsque la valeur d’aucun apport en nature n’excède 30.000 euros et si la valeur totale de l’ensemble des apports en nature non soumis à l’évaluation d’un commissaire aux apports n’excède pas la moitié du capital. Cette règle vaut pour la SARL et l’EURL (cf. articles L. 223-9 et D. 223-6-1 du code de commerce) ainsi que pour la SAS et la SASU (cf. articles L. 227-1 alinéa 5 et D. 227-3 du code de commerce).

Quels sont les risques si les apports en nature ne sont pas évalués par un commissaire aux apports ?

Sur le plan civil, lorsqu’il n’a pas été nommé de commissaire aux apports ou lorsque la valeur retenue pour les apports en nature est différente de celle proposée par le commissaire aux apports, les associés sont solidairement responsables pendant cinq ans, à l’égard des tiers, de la valeur attribuée aux apports en nature lors de la constitution de la société (articles L. 223-9 et L. L. 227-1 alinéa 7 du code de commerce, respectivement pour la SARL pour la SAS).

Par ailleurs, sur le plan pénal, le fait de faire attribuer frauduleusement à un apport en nature une évaluation supérieure à sa valeur réelle est un délit puni d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 375.000 euros (article L. 241-3 du code de commerce).

Est-il préférable de recourir à des apports en nature ou à la reprise des actes par la société ?

De nombreux actifs corporels ou incorporels peuvent alternativement être apportés en nature ou être repris par la société.

L’apport en nature sera choisi pour valoriser les actifs en les incorporant au capital social. En effet, en cas d’apport en nature, les capitaux propres de la société sont augmentés de la valeur totale des apports. Cette valeur peut intégrer, outre les coûts externes, une rémunération du travail effectué, voire du « goodwill », la valeur créée, de la spéculation.

Le reprise des actes accomplis au nom de la société en formation sera préférée pour déduire les charges et récupérer la TVA. En effet, en cas de reprise par la société, les coûts peuvent être comptabilisés parmi les charges déductibles de la société ; la société peut donc déduire les coûts hors taxes de son résultat et récupérer la TVA.

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Par Franck BEAUDOIN, Avocat

Avocat, président et fondateur de la société d’avocats FB JURIS, directeur de la publication des sites juridiques droit.co et idroit.co.

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