Date de première publication sur droit.co : 14 mars 2013
Les développements qui suivent constituent une première présentation générale des problématiques juridiques soulevées par le lancement d’une activité de parfumerie envisagée par une société opérant dans le secteur de la bijouterie et de l’horlogerie.
Le parfum est un produit cosmétique, comme tel soumis à une réglementation spécifique.
Le cadre juridique de cette réglementation, en France, est notamment constitué par une directive du Conseil de l’UE n° 76/768 du 27/07/1976 modifiée à plusieurs reprises et en dernier lieu par la directive de la Commission européenne n° 2003/15 du 27/02/2003, ainsi que par les articles L. 5131-1 et suivants du Code de la santé publique.
Les développements ci-dessous sont fondés sur l’hypothèse que la société sous-traitera la conception et la fabrication des parfums, mais sera juridiquement la “personne pour le compte de laquelle le produit cosmétique est fabriqué” et le “responsable de la mise sur le marché”, au sens des dispositions du Code de la santé publique. Les parfums seront distribués uniquement dans le réseau de distribution sélective de la société. À ce titre, l’essentiel des obligations légales et réglementaires pèsera sur ladite société.
Pour la France, en termes généraux et très succinctement, le cadre juridique, relativement complexe, implique notamment :
– une déclaration initiale à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (nous reproduisons ci-dessous, pour information, l’article L. 5131-2 du Code de la santé publique) ;
– la nécessité de disposer de personnel qualifié disposant des connaissances scientifiques suffisantes attestées par des diplômes, titres ou certificats figurant sur une liste établie par arrêté ;
– une responsabilité particulière du fait des produits, des obligations de sécurité et d’information renforcées ;
– le respect des bonnes pratiques de fabrication dont les principes sont définis par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ;
– le respect des obligations quant à la composition des produits et plus généralement quant à leur fabrication (y compris par exemple les interdictions relatives aux expérimentations animales) ;
– l’obligation de transmettre aux autorités compétentes des informations concernant les substances utilisées dans les produits ;
– les règles spécifiques de mise sur le marché (notification adressée aux autorités compétentes, constitution d’un dossier d’information, tenue des informations au siège social) ;
– la participation au système de cosmétovigilance, l’obligation de suivi des produits et de veille scientifique ;
– le respect des règles spécifiques en matière d’emballage, d’étiquetage et de publicité.
Il convient bien entendu de procéder à une analyse approfondie préalablement au démarrage de l’activité. Cette analyse devra être effectuée en droit français et en droit local, dans chaque pays commercialisant les parfums.
En première réflexion, dans les États membres de l’Union européenne, du fait des directives qui régissent la matière, les règles devraient être en général proches des règles françaises. S’agissant de directives, et non de règlements, il pourrait toutefois y avoir de multiples spécificités nationales, ne serait-ce que d’un point de vue opérationnel.
En première réflexion toujours, la création de l’activité de parfumerie impliquera notamment les actions suivantes :
– analyser de façon approfondie les impacts juridiques (y compris fiscaux) du lancement de l’activité de parfumerie, pour chaque pays commercialisant les parfums, notamment quant aux points suivants :
> respect de la réglementation, accomplissement de toutes formalités et déclarations, voire obtention d’autorisations suivant les pays ;
> analyse de l’impact sur l’objet social des sociétés, les activités déclarées au RCS / registre des sociétés (siège social et établissements) ;
> analyse d’éventuels impacts en matière fiscale ;
> analyse d’éventuels impacts en matière sociale, par exemple au regard des conventions collectives ;
> analyse de la faisabilité au regard de la destination des locaux mentionnée dans les baux des boutiques ;
> analyse de l’impact en matière d’assurance ;
> vérification de l’enregistrement des marques de la société dans les classes de produits concernées ;
> mise à jour des conditions générales de vente (sur Internet) et de la garantie commerciale de la société ;
– définir, négocier et régulariser des avenants aux contrats de distribution en France et à l’international ;
– conclure des avenants aux polices d’assurance.
Les contrats avec le ou les créateurs et fabricants de parfum devront faire l’objet d’une attention toute particulière, afin de sécuriser notamment les aspects suivants :
– nature et étendue des droits de la société (notamment droits sur les parfums, en cas de licence envisager des sous-licences, exclusivité) ;
– garanties du fabricant quant au respect des réglementations applicables dans tous les pays dans lesquels les parfums seront commercialisés ;
– concours actif du fabricant afin de permettre à la société de respecter ses obligations légales et réglementaires (notamment quant à la fabrication des produits, quant à la cosmétovigilance, quant aux obligations d’information).
Au regard des importantes contraintes et des multiples problématiques en cause, il convient de procéder à l’analyse approfondie de tout projet de document contractuel ou même pré-contractuel (telle une lettre d’intention), avant sa conclusion.
La définition d’un calendrier de lancement de l’activité le plus en amont possible est particulièrement nécessaire au regard de l’importance du travail à effectuer en matière juridique.
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Article L. 5131-2 du Code de la santé publique
L’ouverture et l’exploitation de tout établissement de fabrication, de conditionnement ou d’importation, même à titre accessoire, de produits cosmétiques, de même que l’extension de l’activité d’un établissement à de telles opérations, sont subordonnées à une déclaration auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé .
Cette déclaration est effectuée par le fabricant, ou par son représentant ou par la personne pour le compte de laquelle les produits cosmétiques sont fabriqués, ou par le responsable de la mise sur le marché des produits cosmétiques importés pour la première fois d’un État non membre de l’Union européenne ou non partie à l’accord sur l’Espace économique européen. Elle indique les personnes qualifiées responsables désignées en application du quatrième alinéa.
Toute modification des éléments figurant dans la déclaration initiale doit faire l’objet d’une nouvelle déclaration dans les mêmes formes.
La personne qui dirige un établissement mentionné au premier alinéa désigne une ou plusieurs personnes qualifiées responsables de la fabrication, du conditionnement, de l’importation, des contrôles de qualité, de l’évaluation de la sécurité pour la santé humaine, de la détention et de la surveillance des stocks de matières premières et de produits finis. Ces personnes doivent posséder des connaissances scientifiques suffisantes attestées par des diplômes, titres ou certificats figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés de l’artisanat, de l’enseignement supérieur, de l’industrie et de la santé ou justifier d’une expérience pratique appropriée dont la durée et le contenu sont déterminés dans les mêmes conditions.