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Institutions: constitution de 1946

Constitution française de 1946: présentation sommaire.

La Quatrième République

Aperçu sommaire

Le projet de Constitution du 19 avril 1946 est rejeté par le peuple français, par référendum en date du 5 mai 1946.

Le peuple français adopte la Constitution du 27 octobre 1946 par le référendum du 13 octobre 1946.

Souveraineté

La souveraineté est nationale, conformément l’article 3 de la Constitution qui dispose que « La souveraineté nationale appartient au peuple français […]. Le peuple l’exerce, en matière constitutionnelle, par le vote de ses représentants et par le référendum. En toutes autres matières, il l’exerce par ses députés à l’Assemblée nationale, élus au suffrage universel, égal, direct et secret ».

Le suffrage est universel.

Le Comité constitutionnel

L’institution de cet organe est notable en ce qu’il s’agit d’une première tentative d’introduire un contrôle de constitutionnalité en France. Néanmoins, le contrôle conféré à ce Comité ne marque pas véritablement une suprématie de la constitution sur les lois, compte tenu de la formulation de l’article 91 de la constitution.

Attributions

Le Comité « examine si les lois votées par l’Assemblée nationale supposent une révision de la Constitution » (article 91).

Saisine

« Dans le délai de promulgation de la loi, le Comité est saisi par une demande émanant conjointement du président de la République et du président du Conseil de la République, le Conseil ayant statué à la majorité absolue des membres le composant » (article 92).

Composition

Présidé par le président de la République, le Comité comprend les présidents de l’Assemblée nationale et du Conseil de la République, 7 membres élus par l’Assemblée nationale en dehors de ses membres, et 3 élus dans les mêmes conditions par le Conseil de la République (article 91).

Mécanisme (articles 92 et 93)

Le Comité examine la loi et s’efforce de provoquer un accord entre les deux chambres.

A défaut d’accord, il statue dans les 5 jours de sa saisine.

S’il considère que la loi « implique une révision de la Constitution », il la renvoie à l’Assemblée nationale pour une nouvelle délibération :

« Si le Parlement maintient son vote, la loi ne peut être promulguée avant que la […] Constitution n’ait été révisée ».

Portée

Le contrôle de constitutionnalité ainsi instauré a ceci de paradoxal qu’il n’assure pas la primauté de la Constitution, mais au contraire celle de la loi.

Pouvoir législatif

Aux termes de l’article 5 de la constitution, « Le Parlement se compose de l’Assemblée nationale et du Conseil de la République ».

Il s’agit d’un bicamérisme inégalitaire dans la mesure où i) le vote des lois appartient à la seule Assemblée nationale et ii) le contrôle du gouvernement est une prérogative exclusive de l’Assemblée nationale.

Les principales caractéristiques de l’Assemblée nationale sont les suivantes :

– élection au suffrage universel (article 6) ;

– législature de 5 années / renouvellement intégral ;

– 627 sièges.

Le Conseil de la République présente les principales caractéristiques suivantes :

– élection au suffrage universel indirect par les collectivités locales (article 6) ;

– entre 250 et 320 sièges.

L’Assemblée nationale

Les principaux pouvoirs de l’Assemblée nationale sont les suivants :

– initiative des lois (article 14),

– vote des lois (article 13),

– examen et vote du budget / initiative des dépenses (articles 16 et 17),

– participation à l’élection du Président de la République (article 29),

– droit d’accorder ou de refuser sa confiance au Président du Conseil désigné par le Président de la République (article 45),

– mise en oeuvre de la responsabilité ministérielle (article 48),

– autorisation de ratifier les traités (article 27),

– droit d’amnistie (article 19),

– élection de la Haute Cour de justice au début de chaque législature (art. 58).

Le Conseil de la République

Initialement, le Conseil de la République était investi des pouvoirs suivants :

– propositions de lois sans débat (article 14, avant révision),

– examen, pour avis, des projets ou propositions votés en première lecture par l’Assemblée nationale,

– participation à l’élection du Président de la République (article 29).

La révision constitutionnelle du 7 décembre 1954 élargit ses pouvoirs et accroît son influence :

– initiative législative avec possibilité de débattre (article 14, après révision),

– possibilité pour le gouvernement de déposer les projets de loi sur le bureau du Conseil de la République, sauf en matière de ratification des traités et en matière budgétaire (article 14),

– examen des projets ou propositions de lois, concurremment avec l’Assemblée nationale, qui l’emporte cependant en cas de désaccord (article 20 – institution de la navette),

– droit d’amendement (article 20 après révision).

Pouvoir exécutif

Le président de la République

Il est élu par le Parlement (article 29) à la majorité absolue des suffrages exprimés, au scrutin secret (loi organique du 8 décembre 1953).

La durée de son mandat est de 7 années. Il n’est rééligible qu’une fois (article 29).

Le président de la République peut adresser des messages à l’Assemblée nationale (art. 37).

Chacun des actes du président de la République doit être contresigné par le président du Conseil des ministres et par un ministre (article 38).

Le président de la République est irresponsable, sauf en cas de haute trahison.

Les principaux pouvoirs du Président de la République sont les suivants :

– nominations (notamment conseillers d’Etat, préfets, accréditation des ambassadeurs…) (articles 30 et 31),

– signature et ratification des traités (article 31),

– présidence du Conseil des ministres (article 32), du Conseil supérieur et du Comité de la défense nationale (article 33), du Conseil supérieur de la magistrature (article 34),

– chef des armées (article 33),

– promulgation des lois dans les 10 jours de la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée ; dans ce délai, le président peut imposer une nouvelle délibération aux chambres (article36).

Le Conseil des ministres

Sa désignation, son investiture et sa nomination sont réglées par les articles 45 et 46 de la constitution.

Le président du Conseil est désigné par le président de la République.

Le président du Conseil choisit les membres de son cabinet.

L’investiture collective du gouvernement a lieu préalablement à la nomination : l’Assemblée nationale doit accorder sa confiance sur le programme et la politique envisagés (vote au scrutin public et à la majorité simple)

Le président du Conseil et les ministres qu’il a choisis sont nommés par décret du président de la République.

Le Conseil des ministres dispose de l’initiative des lois concurremment avec le Parlement (article 14).

Le président du Conseil assure l’exécution des lois, nomme à tous les emplois civils et militaires autres que ceux pour lesquels la nomination appartient au président de la République, dirige les forces armées (article 47).

Les ministres sont responsables :

– collectivement, ils sont responsables politiquement devant l’Assemblée nationale,

– individuellement, ils sont responsables de leurs actes personnels (article 48), y compris pénalement (articles 56 à 59).

Seul le président du Conseil peut poser la question de confiance.

Les ministres ont accès aux chambres, et doivent y être entendus lorsqu’ils le demandent (article 53).

Organisation des pouvoirs

La Quatrième République est un régime de collaboration des pouvoirs, notamment dans la mesure où le gouvernement participe à l’élaboration de la loi (article 14), et d’interdépendance, notamment en ce que les ministres sont responsables devant l’Assemblée nationale quand l’Assemblée nationale peut être dissoute, même si la dissolution est strictement encadrée (art 51 et 52).

Responsabilité des ministres devant l’Assemblée nationale

Le gouvernement peut poser la question de confiance (article 49).

L’Assemblée nationale peut voter une motion de censure à la majorité absolue des députés (article 50).

Dissolution de l’Assemblée nationale

La dissolution est très encadrée dans la mesure où elle est soumise à la condition de deux crises ministérielles, dans les conditions prévues par les articles 49 et 50, dans une même période de 18 mois.

La décision de dissoudre est prise en Conseil des ministres après avis du président de l’Assemblée.

La dissolution est prononcée par décret du président de la République.

Si la dissolution a été précédée d’une motion de censure, le président de la République doit nommer le président de l’Assemblée nationale président du Conseil et ministre de l’Intérieur.

Classiquement, le parlementarisme attribue la prérogative de dissoudre la chambre au président de la République, de façon à ce qu’il exerce un rôle d’arbitre entre le gouvernement et la chambre.

La dissolution de l’Assemblée nationale n’est intervenue qu’une fois sous la IVe République : en décembre 1955 (président Edgar Faure), en fait à la seule fin de « provoquer des élections selon le système électoral de 1951 avant que la majorité parlementaire ait pu modifier le mode de scrutin » (HAMON, F. et TROPER, M., Droit constitutionnel, p. 458).

Election du Président de la République

Le Conseil de la République et l’Assemblée nationale réunis forment le Parlement. Celui-ci élit le Président de la République à la majorité absolue et au scrutin secret.

Processus normatif

Les dérives de la loi-cadre

Selon l’article 13 de la Constitution de 1946, l’Assemblée nationale vote seule la loi et ne peut déléguer ce droit.

La loi du 17 août 1948 a pourtant renoué, dans une large mesure, avec les décrets-lois de la Troisième République.

Une loi d’habilitation autorise le gouvernement à prendre des décrets pouvant modifier les lois en vigueur pendant une période limitée et dans des matières définies.

La procédure est la suivante :

– habilitation,

– décret pris en application de la loi d’habilitation,

– dépôt du décret sur le bureau de l’Assemblée nationale,

– délai accordé à l’Assemblée nationale pour examen,

– entrée en vigueur à l’expiration du délai si l’Assemblée nationale n’a pas exercé son contrôle.

Les critiques adressées au régime

Les critiques formulées à l’encontre de la IVe République, notamment par Charles de Gaulle (Discours de Bayeux du 16 juin 1946) ou Pierre Mendès-France (Discours d’investiture devant l’Assemblée nationale du 3 juin 1953), permettent de comprendre les causes qui ont précipité la fin du régime.

Par Franck BEAUDOIN, Avocat

Avocat, président et fondateur de la société d’avocats FB JURIS, directeur de la publication des sites juridiques droit.co et idroit.co.

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